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- A c t u a l i t é s

Les zapatistes et l'Internet
La guerre au Chiapas est-elle purement virtuelle?


par Carlos Soldevila

C'était une révolution dans la révolution.
Alors que les zapatistes, armes aux poings, prenaient d'assaut la ville de San Cristobal de Las Casas dans l'État du Chiapas au sud du Mexique, des centaines d'intellectuels recevaient des messages sur Internet et par fax.
Des sympathisants ont aussitôt pris le relais, en Europe, au Mexique et aux États-Unis, assurant une communication directe des rebelles zapatistes avec le reste du monde.
Le gouvernement mexicain perdait tout à coup son contrôle serré des médias. Et les zapatistes remportaient la première bataille : celle de l'information.

Commandant Marcos à cheval Les grands médias du monde entier se sont aussitôt penchés sur la question des zapatistes et de l'Internet, faisant derechef du commandant Marcos le « premier révolutionnaire post-moderne »!
Révolution purement virtuelle? C'est ce que croit le Ministre des affaires étrangères mexicain, José Angel Gurria. Ce dernier a prétendu que le conflit dans le Chiapas n'était « qu'une guerre d'encre et d'Internet ». La réponse de Justin Paulson, le maître d'oeuvre du site W3 officiel des zapatistes, ne s'est pas fait attendre : « Si c'était le cas, dit-il, nous aurions gagné cette guerre depuis longtemps! »

« L'impact de l'Internet a été absolument extraordinaire », affirme cependant Pierre Beaucage, professeur d'anthropologie à l'Université de Montréal et spécialiste des questions autochtones au Mexique. « Pour la première fois un mouvement local a réussi à avoir un contact direct et instantané avec la communauté internationale. N'eut été de l'utilisation des moyens de communication tels l'Internet, le gouvernement mexicain n'aurait pas ordonné à l'armée de rester dans les casernes ».

Est-ce mettre trop d'importance à l'apport du réseau Internet dans le conflit, alors que le Chiapas était envahi par les médias du monde entier?
« Non seulement des milliers de personnes ont été sensibilisées directement par courrier électronique, mais de plus, l'utilisation de l'Internet a donné un côté "branché" à la révolution », prétend Denis Chouinard de Zapatamania. « À Genève, plusieurs se sont intéressés à la révolution zapatiste seulement parce que les rebelles utilisaient les nouvelles technologies. Les zapatistes ont donc réussi à susciter l'intérêt de gens qui sont normalement imperméables à ce qui se passe en Amérique latine. »

Les avis divergent, donc. Mais on semble s'entendre au moins sur deux points : des vies ont été sauvées au Chiapas, et la cause zapatiste est entendue aux quatre coins du globe. Tout ça grâce à l'Internet.


Cet article est en ligne depuis le 14 septembre 1995
Photo du commandant Marcos tirée du site de La Jornada

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