L’impossible accès aux bases de données

La Loi d’accès à l’information du Québec est inopérante. Cette loi, qui s’appelle en fait la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, ne permet pas d’obtenir des bases de données. Dans le monde dans lequel on vit, c’est une aberration.

centropolis-cosmodome

Une autre aberration lavalloise, le Colossus, en construction (été 2000).

Après l’élection de 2001, où Gilles Vaillancourt a été réélu pour la ènième fois à la mairie de Laval en remportant, cette fois-ci, tous les sièges au conseil municipal, j’ai eu des doutes sur l’administration de la deuxième plus grande ville du Québec. Après avoir parlé à différentes sources, notamment des gens qui connaissaient bien la structure des systèmes informatiques de la Ville de Laval, j’ai fait une demande d’accès pour obtenir la liste des factures payées aux fournisseurs de la Ville.

Les contrats que signe une Ville ne donnent qu’une vision partielle de la réalité. Les chèques qu’elle émet à ses fournisseurs donnent un portrait beaucoup plus fidèle des montants qui sont dépensés. C’est ce que je cherchais à obtenir. On m’a expliqué que cette liste de chèques était facilement exportable à partir d’une base de données Oracle que possède la Ville.

J’ai donc fait ma demande d’accès en octobre 2003 en demandant précisément que cette extraction soit faite et que le résultat (un fichier CSV ou XLS) me soit transmis par voie électronique ou sur un CD-ROM.

La Ville a refusé. Ses prétextes? Ce que je demandais était déjà disponible sur support papier. On pouvait m’en faire des photocopies avec plaisir. Mais demander l’équivalent en format électronique était impossible, prétendait-on.

J’ai donc fait appel du refus de la Ville. J’ai fait une demande de révision à la Commission d’accès à l’information.

Devant le commissaire Michel Laporte, la Ville de Laval a prétendu que ce que je demandais était trop compliqué à produire. Il aurait fallu faire travailler des employés la nuit pour programmer et exécuter ma requête sur leur base de données, créer tout plein de fichiers «externes». Bref, le commissaire a été berné. Si les documents existent sur papier, un organisme public n’a pas à les produire électroniquement. Il a donné raison à la Ville de Laval sur base de l’article 15 de la Loi:

15. Le droit d’accès ne porte que sur les documents dont la communication ne requiert ni calcul, ni comparaison de renseignements.

Un «calcul», ça peut être toute opération effectuée par un logiciel. L’exportation d’une base de données entre dans cette interprétation du mot «calcul». Et le commissaire a conclu que «la Ville [n’a] pas à créer de nouveaux fichiers ni à procéder à l’analyse des données informatiques pour confectionner un nouveau document».

Vous voyez l’aberration? Au départ, il y a une base de données. La Ville en extrait des documents qu’elle imprime. La loi donne accès à ces documents imprimés, qui sont en fait des copies partielles du document original: la base de données. Mais la loi ne donne pas accès à ce document original. Ce n’est pas une loi d’accès aux documents adaptée au monde dans lequel on vit, où les informations traitées par les organismes publics sont en grande majorité stockées dans des bases de données.

Il faudrait la rebaptiser: «Loi permettant aux organismes publics de refuser l’accès aux documents qu’ils possèdent».

Pour ceux que ça intéresse, la décision de la Commission sur ma demande est disponible ici:

http://www.cai.gouv.qc.ca/documents/CAI_DSJ_012005av.pdf

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