mercredi, 22 novembre 1995
Zoom in, zap out, sur Liège
Où notre stagiaire, après une escapade hyperrapide à Liège, fait la rue une nouvelle fois, mais, cette fois, avec une cause





Nous avons dit au revoir à Namur très tôt, non sans avoir pris quelques photos sur les bords de la Meuse, à la hauteur de l'île Vas't'y-frotte, version wallonne de l'île aux Fesses.

On nous attend ce matin au Laboratoire d'enseignement multimédia (LEM, fondé en 1980) de l'Université de Liège, à environ trois quarts d'heure en train de Namur.

Sauf que le campus où nous avons rendez-vous, situé dans la banlieue de Sart Tilman, est situé à trois quarts d'heure en bus de la gare de Liège!

Dans un local exigu et vieillot, la responsable scientifique du LEM, Brigitte Monfort, nous reçoit, accompagnée de ses collègues René Cahay, François Rémy et Jean Thérer.
Pas que le local qui était vieillot. La conception du multimédia qu'avaient nos hôtes l'était également. «Dans notre esprit, expliqua Mme Monfort, le multimédia consiste à utiliser différents médias pour enseigner la science.» Quand j'étais à la petite école, on appelait ça les méthodes audio-visuelles et ça prenait la forme de Kouac, de Calinelle et de l'autre bozo des Oraliens.
«Et pour nous, poursuivit Mme Monfort, l'interactivité, c'est l'interaction entre élèves et étudiants, et non entre étudiants et machines.» Bruno, qui oeuvre justement dans le domaine du multimédia appliqué à la pédagogie, semblait un peu décontenancé par les définitions dépassées de nos interlocuteurs.
Reste que, selon moi, il était rafraîchissant de se faire rappeler à quel point les notions de «multimédia» et d'«interactivité» (on peut aussi mettre «virtuel» là-dedans) sont galvaudées de nos jours par toutes sortes de Merlin l'enchanteur qui essaient de nous vendre de la scrap...


Dans l'ordre habituel:
François Rémy, René Cahay et Jean Thérer.

Heureusement, donc, les quatre chercheurs du LEM n'étaient pas de cet acabit. Quand Bruno leur a demandé si Internet et les CD-ROMs d'aujourd'hui pouvaient convenir à l'enseignement, M. Thérer a répondu en bon scientifique: «Ça dépend». Le LEM a établi qu'il existait 4 styles d'apprentissage différent, «et on peut aller jusqu'à mettre quelqu'un en échec en tentant de lui imposer un style d'apprentissage qui ne lui convient pas», a précisé M. Thérer. Les nouvelles technologies de l'information ne sont pas adaptées à tous les styles d'apprentissage et il faut bien connaître ses élèves avant de leur imposer le dernier PowerMac full-multimédia.

Quels sont ces styles d'apprentissage? Les chercheurs du LEM nous ont fait passer un test pour les connaître. Il y en a quatre, qui s'articulent autour de deux axes: on est (intuitif ou méthodique) et (réflexif ou pragmatique). Je suis, attachez vos tuques de snowboard avec du coax, un "méthodique pragmatique", ce qui fait de moi quelqu'un qui est capable de résoudre des problèmes en sélectionnant la solution optimale. Métiers probables: médecin, ingénieur, informaticien. Bref, j'ai raté ma vocation.



D'autres infos sur Liège
(désolé, rien sur les gaufres)

  • Le Centre René Lévesque (!!!), Centre de documentation de la Conférence des Peuples de Langue française.
  • Infos sur Ville de Liège, par la RTFM asbl (Association Réseaux, Télématique, Francophonie et Mutimédia).

  • Étudiants, poil aux dents

    Mais il a fallu que je quitte plus tôt cette séance pour ne pas rater mon train pour Bruxelles. Je suis donc parti de Liège - avec Stéphane, qui m'a accompagné - plus tôt que prévu, car j'avais un rendez-vous à 14h avec la jeune journaliste que j'avais raté la semaine dernière, Anne-Sophie Debliquy-Olbrechts.
    Le trajet fut un peu pénible. Nous voyagions avec tout notre stock, ce qui n'était pas aisé, vu le rush.
    J'arrivai tout de même devant la Bourse avec seulement 10 minutes de retard. Anne-Sophie était là, et nous sommes allés prendre une bouchée au sympathique Falstaff. Son petit frère est branché, son grand-frère, qui vit au Japon (et qui, de là, avait vu mon appel dans soc.culture.belgium et l'avait transmis à sa soeur) l'est aussi. Nous avons élaboré divers scénarios de collaboration et avons convenu de rester en contact.

    La fin de notre discussion fut bruyamment interrompue vers 15h10 par une défilé d'une demi-douzaine de cars de police dévalant à toute vitesse derrière nous, rue Henri-Maus. J'ai laissé Anne-Sophie pour vite aller voir ce qui se passait.
    Sur la Grand'Place, un cordon de flics, full anti-émeute, venaient de faire fuir les manifestants quand je suis arrivé. J'ai donc pourchassé ces derniers, qui essayaient tant bien que mal de se regrouper. Ils y sont parvenus boulevard de l'Empereur, devant le siège social du Parti socialiste.
    C'était beau à voir: drapeaux rouges, slogans, paniers à salade tout près. Les manifestants, des étudiants universitaires francophones et néerlandophones (rarissime unité), dénonçaient d'une même voix les coupures dans l'éducation: «Le P.S. est pour l'école des riches», chantèrent-ils, sous la mesure de quelques leaders avec porte-voix. Quelle discipline, les étudiants belges, par rapport à nos mauviettes de manifestants québécois. Et ils sont mêmes sur le Net! J'ai eu l'occasion de les observer à l'oeuvre, et vraiment, il faudrait s'en inspirer!
    Devant le siège du P.S., les choses ont un peu traîné en longueur. Alors un groupe d'une douzaine de mecs s'est mis à parlementer comme une équipe de rugby, ils ont ensuite entonné un chant guerrier, genre de compte à rebours, puis au signal, ils se sont tous élancés vers deux voitures de police isolées du reste de leurs troupes. Les deux flics somnolants qui les occupaient se sont réveillés très très vite, je vous assure, et ont détalé devant le petit groupe de casseurs!
    Au Québec, quand on veut manifester, il faut demander un permis à la Ville et informer les policiers de notre itinéraire. Mais les étudiants belges n'affichaient pas cette belle conformité! Des flics, parmi eux, essayaient de diriger un peu leur marche. Mais s'ils disaient d'aller à droite, les étudiants viraient à gauche! À part quelques séances de matraquage, rue Notre-Seigneur, le tout se déroula dans la bonhommie. La centaine d'étudiants que j'ai suivis s'est assis quelques minutes sur le boulevard Lemonnier, angle des Foulons, et à 15h45, tout était terminé...
    Le lendemain et les jours suivants, d'autres manifs du genre eurent lieu, dans le but de nuire à la circulation. C'est très important, pour les Bruxellois, de bien circuler, si on se fie au patrimoine qu'ils ont foutu en l'air... pour pouvoir mieux circuler. Les étudiants ont le don de viser là où ça fait le plus mal!


    Bénédicte Servais, et Nicoletta Gardini, d'ImaginAction.
    Les deux photos ci-bas montrent Stephania Gardini, la troisième associée de cette petite entreprise dynamique.


    À cause de la manif, je suis arrivé quelque peu en retard aux charmants locaux d'Imagin'Action, petite entreprise de graphisme et d'infographie qui cherche à prendre pied sur les inforoutes et dont les trois fondatrices sont d'anciennes stagiaires de l'AQWBJ: Bénédicte Servais, et Nicoletta et Stephania Gardini.

    Elles ne sont pas encore branchées et n'ont pas de page web non plus. Cela ne les empêche pas d'avoir confiance. «On parle d'Internet seulement depuis la conférence du G-7 sur les inforoutes, souligna Stephania, philosophe. Et puis, tant que les télécommunications ne seront pas libéralisées, le monopole de Belgacom restera un obstacle au développement de l'industrie.» On prend ça relax, donc. Dolce Vita!



    En soirée, nous avons rejoint
    Danielle Henry et son (futur) mari Didier dans un resto de la place Merode. C'est là qu'ils m'ont confié vouloir venir vivre quelques années au Québec. Mais auparavant, ils aimeraient tâter le terrain ensemble cet été. Et nous avons formulé le projet d'échanger nos appartements, car moi aussi, j'aimerais bien faire découvrir Bruxelles à ma petite famille à l'été 1996. On verra si le temps le permettra.


    Nous couronnâmes cette journée par une authentique session intensive de zigonage pour se trouver une boîte pour sortir, parce que notre choix numéro 1, le Magasin 4, était fermé.
    Je ne me souviens plus où nous sommes finalement allés, seulement que ça s'est terminé très tard et que je partage désormais ma chambre non plus avec Pierre, mais avec Jean-Marc qui, effectivement, ronfle comme un moteur de
    paquebot. Laissez-moi me passer les synapses au Disk Doctor de Norton Utilities, et je vous reviens tout de suite.


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    ©1996 Jean-Hugues Roy (hugo@reporters.net)