Making-of: Facebook (2013-2017)

Facebook est un média.
Près d’un répondant sur deux au Digital News Report 2017 de l’Institut Reuters dit s’en servir comme source d’information.

Dans le Canada francophone, la proportion est encore plus grande nous dit le Centre d’études sur les médias :

55 % des Canadiens francophones (et 71 % des francophones de moins de 35 ans) utilisent Facebook pour consulter, partager ou commenter des nouvelles sur une base hebdomadaire.

Facebook est donc le vecteur de diffusion de l’information le plus important au Québec et au Canada francophone. Mais quelle information les abonnés Facebook d’ici peuvent-ils se mettre sous la dent?

Une façon d’en avoir un aperçu est d’étudier ce que les médias du Québec et du Canada francophone publient sur leurs pages Facebook.

C’est ce que j’ai fait à partir du début de l’année 2018.

Constitution d’un échantillon

À l’aide du Répertoire des médias de la FPJQ, mais aussi en consultant les pages aimées par mes quelque 1800 amis, j’ai constitué une première liste des pages Facebook de 301 médias du Québec et du Canada francophone. On trouve dans cette liste :

Pour chacune de ces pages, j’ai recueilli deux paramètres :

Les mentions « J’aime » sont visibles dans la section « À propos » de toutes les pages :

Mais le nombre de mentions dans d’autres pages n’est accessible qu’au moyen de l’API Graph, de Facebook :

Pour trier les pages les plus populaires dans ma liste initiale de 301, j’ai donc créé un indice en multipliant ces deux paramètres (« L » pour les « J’aime » et « TA » pour le « talking_about_count ») et en divisant par un million.

L*TA/10^6

J’ai pris les 101 premiers en retranchant deux pages d’Ici Radio-Canada à l’extérieur du Québec (ICI Ontario et ICI Manitoba; il reste tout de même trois pages hors Québec: Le Droit, ICI Ottawa-Gatineau et L’Acadie nouvelle), ainsi que le magazine Summum et Droit-Inc. J’ai également ajouté Tabloïd, une nouvelle expérience en ligne de Québecor Média, même s’il se trouvait au 165e rang. J’ai également, dans les derniers rangs, favorisé des médias régionaux (comme EstriePlus ou Le Manic) au détriment de médias montréalais afin d’avoir une plus grande représentativité régionale dans mon échantillon.

Au final, j’ai travaillé avec une liste de 101 médias québécois et francophones du Canada qui représentent les médias d’ici les plus populaires sur le réseau social le plus consulté.

Moissonnage

À l’aide de différents scripts puisant dans l’API Graph de Facebook, j’ai recueilli toutes les publications (« posts ») de ces médias entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017. Il y en a plus de 280 000.

Pour chacune de ces publications, mes scripts ont permis de recueillir 10 paramètres :

  • le nombre de partages (« shares »)
  • le nombre de chacune des réactions possibles
    • « like »
    • « love » ❤
    • « haha » 😆
    • « wow » 😮
    • « sad » 😢
    • « angry » 😡
  • le nombre de commentaires avec
    • les « j’aime » sur ces commentaires
    • le nombre de réponses (ou commentaires) sur ces mêmes commentaires

Depuis le début de 2018, j’ai un autre script qui démarre à 23h59 chaque soir et qui confine dans une base de données SQL toutes les publications de mon échantillon avec un décalage de 15 jours afin de laisser le temps à un nombre suffisant de partages, de réactions et de commentaires de survenir. Ainsi, ma base de données continue de se construire au quotidien.

Je ne cours pas les concours

En analysant les données, je me suis rendu compte que les concours organisés par plusieurs médias caracolaient souvent en tête des publications qui suscitaient le plus d’engagement.

Sur les 280 000 publications récoltées entre 2013 et 2017, 2624 (0,9%) concernent des concours où on invite le public à partager, à «liker», à commenter. Ensemble, elles ont provoqué plus de 1,3 million d’interactions diverses représentant 3,0% de tout l’engagement suscité par les publications des médias étudiés!

Un exemple? En décembre 2016, Salut Bonjour a organisé un concours intitulé «Cadeaux de rêve», commandité par une chaîne de magasins qui a depuis fait faillite. À tous les jours du mois, avant Noël, elle mettait en ligne une vidéo de plus d’une heure avec de la musique des Fêtes en demandant aux gens de lui dire quel est «le cadeau provenant de chez Sears qui saura vous émerveiller et indiquez-nous la raison dans les commentaires». Pour en avoir une idée, voici la vidéo du 20 décembre 2016.

Comme ces interactions ne concernent pas de l’information, j’ai retranché de mon échantillon ces 2624 publications à propos de concours, ce qui fait que le nombre total de publications est d’un peu moins de 280 000.

Limites

Mon étude ne porte que sur les publications que les médias diffusent sur leurs pages Facebook. Si vous partagez un article ou un reportage d’un média directement sur votre fil d’actualité, mais que le média en question ne l’a pas préalablement publié sur sa page, il ne m’est pas possible de l’inclure dans cette étude.

Je ne mesure donc que ce qui se passe sur les pages Facebook des médias échantillonnés. C’est ainsi que dans le cas de cette publication de La Presse, datant de mai 2014, la page Facebook:

… affiche un nombre de partages différent du site web.

Mes données indiquent 2318 partages. La page Facebook en montre un nombre légèrement différent (j’explique pourquoi ci-dessous). La page web en montre 9,5 milliers.

L’API de Facebook indique qu’elle ne retourne qu’un maximum de 600 publications par année. Pour certains médias et certaines années, j’en ai recueilli davantage. Mais il est possible que mon échantillon soit incomplet. Qu’il le soit ou non, il demeure à mon avis représentatif des publications des médias au cours de la période étudiée.

Cette étude n’inclut pas le contenu publié par les médias sous la forme d’Instant Articles. Les Instant Articles sont un autre type de contenu qui est diffusé directement dans le fil d’actualités des gens qui suivent ou aiment une page. Il n’est pas possible d’obtenir des informations sur les interactions provoquées par les Instant Articles au moyen de l’API de Facebook si on n’est pas le gestionnaire de la page.

Si un média publie du contenu par le biais d’un Instant Article, il peut apparaître dans la page. Mais on n’a aucun moyen de détecter le contenu publié directement dans une page par un média du contenu qui apparaît dans une page parce qu’il s’agit d’un Instant Article qui y a été placé automatiquement par Facebook.

Quel effet l’implantation des Instant Articles, à partir de mai 2015, a-t-il eu sur les données de cette étude? Difficile à mesure, car on ignore combien de médias d’ici ont recours aux Instant Articles. Il est possible que les médias dont les chiffres d’engagement ont diminué entre 2016 et 2017 soient des médias qui ont choisi de diffuser plus de contenu par le biais d’Instant Articles plutôt que de le diffuser sur leur page.

On ignore combien de médias d’ici ont recours aux Instant Articles. On sait cependant qu’aux États-Unis, plusieurs médias les abandonnent.

Dans les données, dont je rend accessible, ci-dessous, toute la portion 2013-2017, vous verrez peut-être deux choses qui vous paraîtront étranges.

  1. D’abord, le nombre de partages, de réactions ou de commentaires que vous pourrez voir sur Facebook pourrait légèrement différer de ce qui se trouve dans mes données. C’est que j’ai fait mon moissonnage dans les premières semaines de janvier 2018. Il est possible que certaines publications suscitent encore certaines réactions, commentaires ou aient été partagées entretemps. Il est également possible que certains utilisateurs aient retiré leur réaction ou encore que certains utilisateurs aient cessé d’être abonnés à Facebook et que leurs réactions aient alors cessé de paraître en ligne.
  2. Par ailleurs, on sait que Facebook a instauré, en février 2016, d’autres types de réactions que les «j’aime». Or, on trouve ces nouveaux types de réactions sur des publications des années antérieures, comme celle-ci de Radio-Canada Information datant de 2013. Erreur dans les données? Non. Il s’agit tout simplement de réactions enregistrées après février 2016 par des abonnés Facebook qui ont découvert ce contenu tardivement.
Définition: qu’est-ce que l’engagement

L’engagement est défini par Facebook comme «le nombre total d’actions entreprises sur votre Page Facebook et sur les publications de celle-ci». Ces actions peuvent inclure «l’attribution de mentions J’aime à votre Page, le fait d’aimer une publication, la consultation de votre emplacement, un clic sur un lien, et bien plus», selon Facebook.

Comme on peut interagir avec différents «produits», sur Facebook, il existe plusieurs définitions de l’engagement dans l’univers du marketing. L’engagement d’une publication est généralement reconnu comme étant la somme des partages, des réactions et des commentaires sur cette publication.

J’ai étendu cette définition pour ajouter le nombre de réponses aux commentaires (les gens qui commentent un commentaire) et le nombre de J’aime à un commentaire, deux paramètres qu’il est relativement facile de récolter sur l’API Graph. Les abonnés de Facebook peuvent également réagir d’autres façons aux commentaires («haha», «wow», etc.). Ils peuvent aussi réagir aux réponses à ces mêmes commentaires. L’API Graph permet de compter ces réactions supplémentaires, mais c’est une opération un peu plus complexe qui aurait allongé le temps consacré au moissonnage et que je n’ai donc pas effectuée.

C’est ainsi que ma définition de l’engagement est la suivante: la somme des partages, des réactions (les six possibles) et des commentaires (auxquels on ajoute les «j’aime» à ces commentaires et les réponses à ces mêmes commentaires). L’engagement moyen est l’engagement divisé par le nombre de publications au cours d’une période donnée.

Sommaire des résultats (2013-2017)

L’infographie ci-dessous présente un sommaire de l’ensemble de ces données pour toute la période étudiée (2013-2017).

Sommaire des résultats par année

Le graphique interactif ci-dessous présente, pour sa part, un sommaire par année des différents types d’interaction suscités par les publications des médias d’ici sur Facebook.

Transparence et science ouverte

Comme j’adhère aux principes de la science ouverte, je donne accès à un certain nombre d’éléments permettant à quiconque de reproduire cette recherche:

  • au moins un script et plusieurs fichiers de données peuvent être consultés et téléchargés sur un répertoire dans Github
  • les données brutes pour les années 2013 à 2017 sont pour leur part téléchargeables à partir de Datahub (fichier .sql)
Mises à jour

La section «Limites» de ce texte a été mise à jour le 13 mars pour ajouter des précisions sur les différences entre les interactions enregistrées sur le contenu publié sur une page Facebook et les interactions enregistrées en général. Elle a aussi été mise à jour le 14 mars pour ajouter des précisions sur les Instant Articles. Elle a également été mise à jour le 26 mars pour ajouter une précision sur les limites de l’API Graph de Facebook.

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2 réponses

  1. mars 7, 2018

    […] travail de moissonnage de données dont la méthodologie est décrite de façon exhaustive dans un autre billet. Partager // Sharrre jQuery( function($) { // $('head').append( $( '', { id : […]

  2. mars 13, 2018

    […] travail de moissonnage de données dont la méthodologie est décrite de façon exhaustive dans un autre billet. Partager // Sharrre jQuery( function($) { // $('head').append( $( '', { id : […]

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